La campagne de sociofinancement, L’Estrie se fait son cinéma, se terminera le 4 octobre prochain. Le montant initial demandé, 75 000 $, a déjà été dépassé : la réponse du public a été des plus favorables. Anh Minh Truong, réalisateur et coscénariste, pourra ainsi réaliser son premier long métrage en sol estrien, aux côtés de gens qui ont cru depuis le jour 1 en son projet de film.
Anh Minh Truong, tu as coécrit le film Des hommes, la nuit durant de longues années et après plusieurs demandes aux organismes subventionnaires, tu n’as pu obtenir le financement nécessaire pour le faire. On t’a d’ailleurs entendu dire : « je croyais que mon film était mort ». Comment est née l’idée de faire une campagne de sociofinancement pour ne pas le laisser mourir ?
J’avais pris toutes les rondes de dépôts auxquelles j’avais droit pour demander du financement, ce qui est le cas pour plusieurs cinéastes au Québec. Pour les 20-25 longs métrages qui sortent par année, il y en a environ le triple qui ne voit pas le jour. L’enveloppe budgétaire totale en cinéma n’est pas assez grande pour la quantité de talents que l’on a. J’étais en réflexion à savoir comment donner vie à mon film malgré tout.
Laurent Allaire [producteur chez Chasseurs Films] était au courant de mon projet. Et quand il a su que mon film était mort aux institutions, il n’a pas voulu me laisser hypothéquer ma maison (rires). Véronique [Vigneault] et lui se sont rencontrés la semaine d’après. Véronique, que je connais depuis longtemps, avait déjà lu le scénario. Ils ont eu le désir commun de dire : « Il faut faire en Estrie des longs métrages de fiction. Et il faut faire celui de Minh en premier. »
Ça tombait bien parce que mon film était mûr. Ça devenait comme un cercle parfait parce que mon collègue et moi l’avons écrit en pensant que l’histoire se passait dans le coin. Pour nous, c’est clair que telle côte dans le film, c’est la côte Don Bosco (rires).
La campagne a, jusqu’à ce jour, amassé 90 685 $ (plus 78 250$). Êtes-vous satisfaits de ce montant ?
Oui. Plus on a de sous, meilleur le film sera. Nous pourrons nous permettre plus de journées de tournage et de faire un film de plus grande envergure. Si les gens veulent assister à la première, venir au tapis rouge ou voir leur nom au générique, c’est maintenant qu’ils doivent cotiser. Après le 4 octobre, ce sera fini.
L’objectif initial d’amasser 75 000 $ était assez ambitieux, n’est-ce pas ?
Oui, c’est très gros. En Estrie, sur la plateforme La Ruche, nous sommes la deuxième plus grosse campagne jusqu’à date. Mais le réseau d’ici est fort et les gens en Estrie veulent un film. On a visé un gros montant, mais ce n’était pas notre première campagne à Véronique [Vigneault] et moi. On était préparés et on y travaillait depuis plus de 6 mois.
Es-tu surpris de la réaction très positive de la population ? Pensais-tu qu’elle serait aussi favorable ?
En fait, ce qui est étonnant c’est qu’il y a aussi des gens de Montréal, de Québec et d’ailleurs qui appuient la campagne. La campagne a dépassé la région et ça m’a surpris, car l’axe de communication principal était l’Estrie. On reçoit beaucoup d’amour en faisant une campagne comme celle-là. Je reçois des chèques chez nous de personnes que je n’ai jamais rencontrées. Il y a même des personnes qui ont vu mes films à mes tout débuts qui m’écrivent et contribuent, même s’ils ne m’ont pas vu depuis 25 ans (rires) !
Est-ce qu’un film a déjà été financé grâce à une campagne de sociofinancement comme la tienne ?
Oui, le film de Julien Lacroix et d’Adib Alkhalidey. La campagne a également été faite sur La Ruche. Il y a de plus en plus de films qui se financent de cette façon.
Le film coûtera un demi-million de dollars. Où irez-vous chercher la somme supplémentaire ?
Il y a d’autres sources de financement traditionnel comme le CALQ, la SODEQ et Téléfilm Canada pour le financement de la postproduction du film [l’appui pour la production a été refusé, mais il est possible de le demander pour la postproduction] et d’autres commanditaires. Mais c’est Véronique [Vigneault] qui gère les cordons de la bourse !
La distribution est composée de certains comédiens d’ici. Est-ce que ça allait de soi pour toi de choisir des gens de la région pour ton film ?
Quand j’ai écrit le film, j’avais déjà plusieurs comédiens en tête, comme Luc Guérin et Édith Cochrane, qui ne sont pas de l’Estrie. Mais en ramenant le film ici, oui, on voulait trouver des gens qui étaient de la région et qui fitaient bien dans le casting, comme Jean-Moïse Martin, Marie-Évelyne Lessard, Sonia Vachon, Emmanuelle Laroche et Pierre Hébert. Donc les trois quarts de la distribution viennent de l’Estrie.
Quel sera l’apport du BEAM dans ce projet ?
Si on faisait un film ici, il fallait que Le BEAM soit avec nous. On sait que Le BEAM est un acteur important du milieu et qu’il a un poids. À l’approche du tournage, Le BEAM sera sollicité pour de l’organisation et du repérage de lieux de tournage.
Penses-tu que cette campagne ouvrira la porte à d’autres projets ?
Oui. C’est le but. Il ne faut pas que le film soit un one shot. Je ne voudrais pas que dans 10 ans, il n’y ait pas d’autres films qui aient suivi. Le but est d’arriver à créer un mouvement et de mettre les germes d’une industrie pour que d’autres personnes produisent des films ici. Chaque film est un combat, il n’y a pas de formule magique, mais ça se fait !
Voici de précieux partenaires et contributeurs du projet:
- La Maison du cinéma (qui fournira tous les billets de cinéma) - MRC des Sources -Restaurants : Pizzicato et Auguste (qui offriront la nourriture pendant le tournage) - Institutions scolaires : Le Salésien, École Mitchell-Montcalm, École de musique de l’UdeS, Agence-école de l’UdeS - Sherweb - Dunton Rainville - Services immobiliers First - Beauvoir Agence Créative - Sherbrooke Toyota
Il ne reste que 4 jours à la campagne ! Participez au financement du film en cliquant ici.